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Recommandations de bonnes pratiques vis-à-vis des personnes trans

Cet article vise à fournir des pistes de réflexion et des recommandations aux astrologues qui aimeraient faire leur possible pour accueillir respectueusement des client·es trans. J’ai écrit ce texte avec mes collègues astrologues en tête, mais je pense que dans une certaine mesure il peut s’appliquer ou du moins être utile pour d’autres professionnel·les, notamment les cartomancien·nes. Il s’adresse de toute évidence particulièrement aux personnes cis (= qui ne sont pas trans elleux-même).

Cependant, si vous ne connaissez presque rien, ou peu de choses, aux questions trans, je vous recommande d’aller prendre le temps de parcourir le site WikiTrans, qui est une mine de ressources claires et accessibles. Cet article n’a pas pour objectif de répondre aux questions les plus courantes et basiques sur les parcours trans, la cisnormativité, etc. Mais WikiTrans le fait très bien ! Cette page spécifique est une excellente intro aux bases en 5 minutes et vous permettra de saisir le vocabulaire que j’emploie au cours de cet article si vous ne le connaissez pas déjà. J’ai aussi inclus des recommandations de ressources en fin d’article.

Considérations générales

Une de mes premières recommandations est de ne pas s’attendre à ce qu’un·e client·e trans veuille forcément parler de questions trans avec vous. Il est possible que quelqu’un vienne vous voir avec des demandes en lien avec sa transition, mais il est possible aussi que la personne ait des demandes qui ne sont pas en lien direct avec cela (par exemple concernant sa vie professionnelle, sa vie amoureuse, ses projets de voyage ou de parentalité, sa vie spirituelle, etc).

un drapeau trans (rayures bleue, rose, blanche, rose, bleue) volant

S’il n’y a pas de demande explicite à ce sujet de la part de la personne, et si ça ne sert pas un but précis, je ne recommande pas de lui poser des questions sur sa transition. Bien évidemment, la recommandation de discrétion et de ne pas poser de questions intrusives durant une consultation s’applique de manière générale, mais il me semble particulièrement important de le souligner ici, car il est bien trop courant que des personnes cis pensent parfaitement acceptable de poser des questions déplacées à des personnes trans au sujet de leur transition (« Est-ce que tu veux te faire opérer ? », « Qu’en pense ta famille ? », etc). Pour perspective ; si vous ne poseriez pas de questions sur ses parties génitales à une personne cis, il n’y a pas de raison de le faire davantage pour une personne trans. (Et si vous avez l’habitude de poser des questions d’ordre génital à votre clientèle hors demande spécifique de leur part, il y a une remise en question à faire de toute évidence !)

Dans certains cas, il est pertinent d’aborder le sujet de la transition, notamment si la personne a des demandes liées à sa transition d’une manière ou d’une autre, mais il me semble important de ne pas donner l’impression à la personne qu’elle doit absolument rentrer le détail, et d’être attentif·ve à poser des questions parce qu’elles sont utiles pour élaborer vos délinéations et répondre à ses demandes, et pas par pure curiosité.

Gardez en tête que beaucoup de personnes marginalisées auront été mises en situation d’être traitées comme des bêtes de foires, donc évitez d’ajouter à cela en traitant votre client·e comme une curiosité fascinante ou une opportunité d’apprentissage sur des catégories sociales. À l’évidence, personne n’a envie de se sentir déshumanisé·e lors d’une consultation.

Aucun·e client·e trans ne vous doit d’explications sur sa transition ou la manière dont elle se définit, et ce, quel que soit son cispassing (= si elle peut passer pour cis ou non).

J’ajouterais que si vous n’avez pas déjà une familiarité marquée avec les problématiques que rencontrent les personnes trans (et si vous êtes cis, c’est probablement le cas), il vaut mieux se taire que dire des bêtises. Je ne dis pas ça méchamment, c’est juste un constat : l’immense majorité des personnes cis que je rencontre ne comprennent pas ce que l’on vit et projettent sur nos vécus des trucs complètement à côté de la plaque. Or, ce n’est pas le rôle de votre client·e trans de vous éduquer à ce sujet – pas dans le cadre d’une consultation où cette personne vous paye justement pour votre expertise et votre écoute.

Pour résumer :

– Les client·es trans ne sont pas forcément là pour parler transition

– Éviter les questions intrusives et déplacées

– S’assurer que la personne trans ne se sent pas examinée comme une curiosité

– Ne pas projeter ses propres idées reçues sur la transition

– Ne pas s’attendre à des explications détaillées ou un cours sur les questions trans

Les pronoms et accords

La question des pronoms et accords est à la fois simple et potentiellement épineuse. Certaines personnes recommanderaient de commencer la consultation en disant ses pronoms, et en demandant ceux qu’utilise la personne qui consulte : par exemple « Bienvenue, je m’appelle Marie, j’utilise le pronom elle et les accords féminins, et toi ? » ou « Salut, moi c’est Romarin, j’utilise iel et les accords neutres, et toi ? ». Il est possible que cela convienne à une bonne proportion de personnes trans, cependant, je ne suis pas persuadé·e que ce soit optimal, et il y a plusieurs raisons à cela.

Pourquoi demander en consultation n’est pas forcément la meilleure option

Il est possible que la personne trans qui vous consulte ne soit pas encore tout à fait au clair avec ses pronoms. Cela peut être le cas de personnes en questionnement, en début de transition, … Se retrouver à devoir expliquer ça en visio à quelqu’un qu’on ne connaît pas, ou peu, peut être assez désagréable (euphémisme pour beaucoup). Certaines personnes n’ont peut-être tout simplement pas envie de démarrer la consultation en parlant de leur genre, d’être renvoyé·es à leur cispassing, avec ce que ça peut amener en termes de charge émotionnelle.

Même quand on est sûr·e des pronoms et accords que l’on veut voir utilisés, on a peut-être pas forcément envie de devoir l’expliquer en début de consultation. Les personnes trans peuvent souvent être fatigué·es de devoir s’expliquer, voire se justifier ou se défendre, face à des personnes transphobes ou tout simplement ignorantes des questions trans. Et cela peut parfois créer une hypervigilance autour des interactions sociales : va-t-on me demander de faire un mini-cours sur la transidentité ? Va-t-on me poser des questions intrusives sur ma transition ? Est-ce que la personne va faire une tête bizarre quand je lui dis mes pronoms ? Vous rencontrerez peut-être des personnes trans ravies de vous expliquer leur parcours ou de vous exposer dans le détail le pourquoi du comment des revendications trans, mais ne partez pas du principe que ce sera le cas (et, comme mentionné plus haut, ce n’est de toute manière pas le moment si c’est votre client·e !).

Il faut se poser la question de la motivation à demander les pronoms de cette manière, au tout début de la consultation. Est-ce vraiment indispensable au bon déroulement de la consultation ? Personnellement, je ne genre tout simplement jamais mes client·es lors d’une consultation : je m’adresse directement à la personne, donc je n’ai jamais la nécessité d’utiliser il, elle, iel, ael ou autre, et pour des adjectifs genrés il est toujours possible de tourner la phrase autrement. Si vous avez l’habitude de ponctuer vos phrases de « Meuf » ou « Mec » c’est sûr que c’est un pli à prendre (c’était mon cas il y a quelques années !). C’est une question d’habitude, bien sûr, mais c’est tout à fait faisable. Il me semble d’ailleurs qu’arrêter de genrer inutilement notre discours est une problématique féministe, pas « juste » trans.

Demander par écrit sans exiger

Après réflexion, j’ai décidé de donner la possibilité de communiquer les pronoms et accords utilisés par écrit, dans le formulaire pour prendre rendez-vous, avec l’intitulé suivant : « Les pronoms et accords que vous utilisez ». Le champ n’est pas requis pour valider le formulaire, ce qui laisse la possibilité à quelqu’un de ne pas indiquer ses pronoms, si cela était un blocage.

Il arrive que la question des pronoms et accords soit abordée par lae client·e. Bien entendu, je ne préconise pas d’en faire un tabou, ou de refuser d’aborder la question lors de consultations ! Il s’agit tout simplement de ne pas l’imposer et de ne pas faire un sujet quand ce n’est pas une nécessité.

Respecter les pronoms et accords renseignés

Il va de soi que l’on respecte les pronoms et accords renseignés par la personne. Évidemment, prenez les infos qui vous ont été données au sérieux.

Et oui, bien sûr, cela s’applique quel que soit son cispassing. Autrement dit, même si la personne qui vous consulte n’a pas, selon vous, « l’air d’être un homme », si ses pronoms indiqués sont il/lui et masculin, vous le genrez quand même au masculin ! Même remarque pour une personne qui utilise le pronom elle et les accords féminins et qui aurait des marqueurs de genre que vous êtes habitué·e à ne pas considérer comme féminins.

Un autre élément à avoir en tête est qu’il est tout à fait possible qu’une personne utilise il/lui et des accords masculins, mais soit non-binaire et ne souhaite pas être appelé « mec » ou considéré comme un homme. Même remarque pour des personnes transféminines. Donc tenez-vous en aux pronoms et accords.

En effet, il arrive que des personnes cis pleines de bonne volonté renforcent les marqueurs genrés dans leur discours dans l’objectif de « valider » le genre d’une personne trans, par exemple en renchérissant avec des « Mec, champion, gars, … » ou « Meuf, bella, … » ou en faisant des compliments genrés «(« T’es trop belle », etc). C’est au mieux un peu maladroit, au pire carrément gênant voire déplacé. Ne partez pas du principe qu’une client·e trans (ou cis, d’ailleurs !) attend votre validation sur son apparence ou sur son genre. Ce n’est pas votre rôle ! Et il peut y avoir un côté très performatif à ce genre de choses : « Regarde comme je suis un bon allié qui te genre correctement !! », qui au fond servirait surtout à vous rassurer en tant que personne cis et qui ne vient pas d’une demande de la personne trans.

Je vous recommande de ne pas vous laisser intimider par des néo-pronoms (iel, ael, ol, ul) ou des accords neutres que vous ne savez pas commencer prononcer à l’oral (heureux·se, content·e, …), parce que de toute façon, vous n’aurez probablement pas besoin de les utiliser à l’oral dans le cadre de la consultation, comme je l’expliquais plus haut.

Si toutefois cela arrive, et si vous vous trompez de pronoms et/ou d’accords, corrigez-vous promptement, présentez vos excuses, et passez à autre chose. Inutile de s’apesantir dessus ou de se flageller jusqu’à ce que la personne vous rassure. Inutile aussi de vous justifier, de vous lamenter comme quoi c’est difficile quand même, ou quoique ce soit de cet ordre, qui serait juste d’autant plus laborieux pour la personne que vous avez mégenrée.

Pour résumer

– Ne pas imposer la question des pronoms et accords comme un sujet de discussion

– Demander les pronoms et accords de préférence à l’écrit, de manière non-obligatoire

– Laisser la personne aborder le sujet elle-même lors de la consultation si besoin

– Ne pas genrer intempestivement la personne

– En cas d’erreur, se corriger et s’excuser et ne pas s’apesantir


Souffrance, euphorie, validisme

Les représentations les plus connues et facilement accessibles de personnes trans sont souvent vilifiantes, au mieux très incomplètes, parfois particulièrement centrées sur la souffrance. Si vous ne connaissez que très peu les enjeux trans, je vous recommande donc d’éviter de vous baser sur des films à succès en pensant que c’est une représentation juste des personnes trans. Malheureusement, les représentations les plus connues du grand public ont souvent été faites par et pour des personnes cis, et donc sont à côté de la plaque pour ne pas dire très transphobes.

Un des problèmes majeurs dans certaines représentations est qu’elles se centrent sur la souffrance d’être trans, plutôt que sur la souffrance de subir la transphobie (discriminations, obstacles au parcours de transition, harcèlement, violences, etc). Ne partez pas du principe qu’une personne trans va être en souffrance du fait d’être trans, détester son corps, souhaiter être cis. Quelle que soit sa situation, évitez de traiter la personne avec pitié et condescendance.

Si vous connaissez les revendications anti-validistes et notamment le modèle social du handicap, sans doute ces conseils vous sont-ils familiers.

L’astrologue Ursula Rising, une femme trans, a récemment fait remarquer dans un fil Twitter que la transphobie existe en partie comme conséquence du validisme. Elle avance qu’être trans est une situation de handicap, et que si cette affirmation sonne comme une insulte envers personnes trans, cela lui donne précisément raison. Elle poursuit en expliquant : « Je suis née avec un corps qui a besoin de soin médical afin de survivre. C’est tout. C’est aussi simple que ça. Je suis née avec un corps qui nécessite un traitement hormonal de substitution, de la même manière que je suis née avec un corps qui a besoin de lunettes pour voir clairement. »

Ursula soulignait aussi via Twitter qu’il peut arriver que des personnes cis aient du mal à concevoir que des personnes trans veuillent un traitement hormonal de substitution ou des opérations chirurgicales dans le cadre de leur transition, parce que ces personnes cis s’imaginent prendre ces hormones ou avoir ces opérations et se rendent compte que cela les fait se sentir horriblement mal. Ursula poursuit « Ce qu’iels ne savent pas est que cette douleur qu’iels imaginent est de la dysphorie. La douleur que nous ressentons à chaque instant durant lequel nous n’avons pas le soin médical dont nous avons besoin. »

Je vous encourage vivement à vous détacher de l’idée qu’il faut forcément tout savoir et tout comprendre sur le vécu de quelqu’un pour lae respecter, toutefois, je pense que des perspectives telles que celles que partage Ursula peuvent aider à saisir certains enjeux des vécus trans et mieux résister à la propagande transphobe florissante.

« Les droits trans sont des droits humains »

Peut-être vous posez-vous maintenant la question : que faire si un·e client·e trans veut prendre rendez-vous pour une consultation d’astrologie natale avec moi dans le but spécifique de parler de sa transition alors que je n’y connais pas grand-chose ? Il serait probablement avisé de reconnaître que c’est au-delà de vos compétences et rediriger vers un·e astrologue trans si possible. On peut faire des dégâts en acceptant d’accompagner quelqu’un alors que l’on n’a pas les perspectives et connaissances nécessaires, et ce même si la bonne volonté est au rendez-vous. A minima, faites preuve de transparence avec la personne afin que son choix soit informé.

Je précise cependant que ce cas de figure me paraît relativement peu probable : il me semble que la plupart des personnes trans qui souhaitent s’entretenir spécifiquement de transition auraient le réflexe d’aller vers un·e astrologue trans.

Si vous recevez une demande d’astrologie élective pour une question de transition (par exemple le dépôt d’un dossier de changement de prénom, le commencement d’un traitement hormonal de substitution, une opération chirurgicale…) et que vous n’avez pas de collègue trans à recommander, je vous recommande de prendre le temps de vous former un peu plus que le minimum en parcourant les ressources recommandées.


Sources, références et recommandations de ressources

Wikitrans https://wikitrans.co/

Véritable mine de ressources gratuites, aussi bien à destination des personnes trans que de leurs allié·es.

OUTrans https://outrans.org/

OUTrans est une association féministe d’autosupport trans. OUTrans propose des formations ou sensibilisations sur les transidentités et l’accueil des personnes trans ; pour en savoir plus, voir leur page formations ici : https://outrans.org/formations/

ReconnaiTrans https://reconnaitrans.tumblr.com/

“ReconnaiTrans,” contraction de “reconnaissance” et de “transidentité” est un projet de bande dessinée, qui a pour but de mettre en lumière la vie des personnes transgenres et/ou non-binaires, ainsi que les actes, paroles, situations transphobes/enbyphobes/cissexistes subis. Ce projet de Laurier The Fox existe maintenant sous forme d’album.

– Espace Santé Trans https://espacesantetrans.fr/

Cette association rassemble des militant·es et professionnel·les de santé trans et cis, sensibilisé·es aux différents besoins et difficultés rencontrées par les personnes trans en matière d’accès à la santé. Leur site propose des brochures, et l’association organise des permanences d’écoute, des formations, etc.

– Liste de ressources pour un français non-binaire https://gersande.com/blogue/liste-de-ressources-pour-un-francais-non-binaire/

Un ensemble de ressources pour pouvoir s’exprimer en français de manière non-binaire (= pas seulement strictement féminin vs masculin).


J’espère que cet article aura permis de répondre à certaines questions courantes, de clarifier des points importants, et de fournir des pistes de réflexion pour accueillir respectueusement une clientèle trans. Si vous souhaitez soutenir mon travail, ma page Patreon est par ici !

Une réflexion sur “Recommandations de bonnes pratiques vis-à-vis des personnes trans

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